En 2006, une nouvelle Constitution congolaise est entrée en vigueur. Celle-ci désigne la contestation de la légitimité des institutions comme une des causes principales des nombreuses crises politiques qui ont eu lieu depuis l’indépendance en 1960. Dans l’objectif de mettre fin à ces crises, cette nouvelle constitution fonde les bases d’un nouvel ordre politique avec des élections libres et démocratiques.
"Depuis son indépendance, le 30 juin 1960, la République Démocratique du Congo est confrontée à des crises politiques récurrentes dont l’une des causes fondamentales est la contestation de la légitimité des Institutions et de leurs animateurs. Cette contestation a pris un relief particulier avec les guerres qui ont déchiré le pays de 1996 à 2003. En vue de mettre fin à cette crise chronique de légitimité et de donner au pays toutes les chances de se reconstruire, les délégués de la classe politique et de la Société civile, forces vives de la Nation, réunis en Dialogue intercongolais, ont convenu, dans l’Accord Global et Inclusif signé à Pretoria en Afrique du Sud le 17 décembre 2002, de mettre en place un nouvel ordre politique, fondé sur une nouvelle Constitution démocratique sur base de laquelle le peuple congolais puisse choisir souverainement ses dirigeants, au terme des élections libres, pluralistes, démocratiques, transparentes et crédibles."
Malheureusement, malgré l’instauration de ce nouvel ordre politique, nous constatons que les problèmes liés à la crise de légitimité continuent, la guerre ne s’arrête pas, en particulier dans la partie Est du pays, et d’autres crises d'insécurité interviennent sporadiquement un peu partout.
Comment expliquer que ces problèmes perdurent ? Pour cela, penchons-nous un peu plus sur les hommes politiques congolais.
Posons-nous la question. Qui sont les riches au Congo ? Ce sont majoritairement des politiciens. Au regard des salaires démesurés (dont le montant exact est difficile à connaître) et de tous les autres avantages qu’ils reçoivent, les politiciens congolais véhiculent un message simple : Tu aimerais gagner beaucoup d’argent en très peu de temps ? Eh bien deviens politicien.
Être chanté par des musiciens, rouler dans de grosses 4x4, porter des costumes de luxe sans se cacher, partir en vacances en Europe, aux USA ou encore à Dubaï, telle est la vie d’un politicien congolais, surtout quand il assume une fonction de l’Etat. Les enfants des politiciens sont scolarisés dans des écoles internationales ou carrément à l’étranger et, lorsqu’ils tombent malades, ils ne vont bien sûr pas se faire soigner dans un hôpital public.
Quand un membre de la famille est nommé ministre, devient député ou encore mandataire dans une société de l’Etat, une fête est organisée en son honneur et un pasteur est invité pour faire une prière de remerciement à Dieu et chasser les démons qui feraient qu’il ne puisse garder ce poste. Une phrase en lingala accompagne généralement cette évènement : Sikoyo tour na biso. En francais, c’est à notre tour. C’est-à-dire que c’est à notre tour de devenir riche.
La soif de richesse et de pouvoir explique aussi la transhumance de la sphère politique congolaise : nous assistons à des changements de camp politique en fonction de l’opportunité qui se présente, avec pour seul objectif la course au pouvoir et l’enrichissement illicite et rapide. Sans idéologie commune, sans programme de gouvernance commun, sans vision claire de l’avenir du pays, la marmite du pouvoir devient un fourre-tout dans lequel un groupe d’individu se rassemble pour partager le gâteau sans définir concrètement c’est qui représente les priorités pour le peuple.
Ce système opportuniste et ce manque de vision commune sont aussi des raisons qui bloquent le développement de la RD Congo. L’actuel chef de l’Etat Felix Tshisekedi s’est retrouvé face à ce problème de manque d’objectif commun au sein du gouvernement. Au début de son mandat, le président partageait son pouvoir avec des membres de l’ancien régime selon un accord signé entre les deux partis. Les membres du régime précédant l’empêchant de matérialiser sa vision en bloquant ses initiatives, Tshisekedi a mis fin à cet accord.
Les gens adhèrent à des partis politiques pas par convictions mais par opportunisme. Tout est une question d’intérêt, mais en tout cas pas d’intérêt général d’abord.
La question que tout intellectuel congolais doit se poser est de savoir si nous sommes fiers de ce que nous avons fait de notre beau pays.
Quand nous regardons l’état des écoles, des hôpitaux, des routes, la prise en charge de la jeunesse, des fonctionnaires, même le peu d’infrastructures que nous avons trouvé juste après avoir obtenu l’indépendance, pouvons-nous dire aujourd’hui que nos dirigeants font correctement leur travail ?
Les pères de l’indépendance qui ont milité pour la dignité et le respect des congolais et qui ont même sacrifié leur vie pour cette cause, sont-ils fiers de la répartition de la richesse quand plus de 70% des assignations du budget sont orientées vers les institutions et seulement les miettes sont réservées à la majorité du peuple ? Systématiquement, chaque année, c’est quasiment dans chaque institution qu’il y a dépassement budgétaire de 50 à 100%. Comment peut-on rêver d’un avenir radieux dès lors que presque toutes les aires de jeux où les enfants pouvaient jadis se rendre pour jouer ont été rachetées par des personnes puissantes et intouchables ou simplement abandonnées ? Comment des élus matures et formés peuvent accepter, par seule soif de pouvoir et de richesse, que des enfants soient sacrifiés en guerre, enrôlés de force dans l'armée ou dans des mines, ou que des femmes soient violées ? Et s'il s'agissait de leurs enfants, de leur femme ?